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LE CONTENU DE LA CRIMINOLOGIE

 

 

La criminologie clinique se propose de rechercher la dangerosité du délinquant à l’aide de l’examen médico-psychologique et social. Cette recherche a pas pour but d’évaluer l’état dangereux actuel du sujet mais également son état dangereux futur. Ces différentes opérations tendent à essayer de traiter le sujet délinquant par la mise en œuvre d’un programme de traitement.

 

LA RECHERCHE DE L’ETAT DANGEREUX :

 

Elle va se faire à l’aide  de l’examen médico-psychologique et social du sujet qui constitue selon Jean Pinatel « la clé de voûte » de la criminologie clinique.

Dans cet objectif, certaines méthodes vont être mise en œuvre, les premières sont dites fondamentales et elles peuvent suffire parfois à apprécier l’état dangereux du sujet mais dans des cas plus difficiles on va avoir recours à d’autres méthodes qui vont constituer un complément des premières. Enfin on peut avoir recours à d’autres, plus subjectives.

 

I – LES METHODES FONDAMENTALES :

 

A – LES METHODES D’ENQUETE SOCIALE ET L’EXAMEN PSYCHOLOGIQUE :

 

1 – l’enquête sociale :

 

Elle consiste à interroger un certain nombre de personnes dans le lieu où le sujet à évolué (entourage, parent, le maître d’école,…). Cette enquête s’attache à déceler la part de l’hérédité et du milieu dans la genèse de la délinquance. Elle va alors reconstruire l’histoire du sujet, de sa famille et de son délit.

L’enquêteur de personnalité doit être compétent, il doit connaître le droit, être familiarisé avec les notions médicales ou psychologiques et doit pouvoir joindre à l’expérience du milieu qu’il observe des qualités personnelles de tact et de discrétion.

 

2 – l’examen psychologique :

 

Il se fonde sur des tests qui vont servir de base pour les jugements et les prédictions. Il y a trois grandes catégories de tests :

  • Les tests d’intelligence, qui se propose de mesurer l’intelligence. Le premier a été élaboré par Binet-Simon pour les enfants en difficulté. Depuis il y a eu de multiples tests. Pour les délinquants, on emploie en principe le « Weschler » qui permet d’établir un quotient intellectuel dont la valeur est strictement quantitative. Ces tests vont permettre de déceler certaines débilités mentales.

     

    La moyenne est fixée à 100.

     

      • l’idiot à un QI de 20 : irresponsable car correspond à quatre ans d’âge mental

      • l’imbécile, ou le crétin à entre 20 et 50 et un âge mental entre 4 et 7 ans

Ces individus sont en principe jugés irresponsables pénalement.

      • le débile à entre 50 et 70 (âge mental entre 5 à 11 ans). C’est eux qui posent plus de problèmes en ce qui concerne le discernement.

      • 100 et +. L’intelligence et l’acte criminel ici sont dissociés. Leur pleine responsabilité ne fait aucun doute.

 

Ces tests sont en général complétés par des tests particuliers qui peuvent mettre en évidence les fonctions de l’intelligence (compréhension, mémoire, adaptation, imagination, verbale) ainsi que la profondeur de l’intelligence (concrète, abstraite, subjective, objective).

·                    Les tests de caractère, qui sont depuis longtemps employés aux Etats-Unis sous forme de questionnaire ou d’épreuve objective. Dans les tests de type questionnaire, on peut citer le M.M.P.I. qui présente des questions apparemment insignifiantes  destinées à ne pas éveiller la méfiance du sujet ; il possède par ailleurs une longue échelle de mensonges qui porte sur les comportements sociaux auxquels la majorité des sujets reconnaît contrevenir. Ce test permet de mettre en évidence des traits psychopathiques et abandonniques qui se révèlent plus fréquents chez les récidivistes que les primo délinquants. Dans les tests objectifs, on peut citer le test de sens éthiques élaboré aux Etats-Unis et repris en France par le Dr Heuyer. Dans cette même catégorie de test, le mira Y Lopez permet une approche des pulsions (instabilité émotionnelle, d’impulsivité, agressivité).

Il y a un certain nombre d’épreuves destinées à mettre en lumière la psychologie des attitudes morales et le caractère malhonnête.

·                    Les tests d’orientation professionnelle : On peut citer le test des labyrinthes de PORTER qui consiste dans l’étude de :

          • Certaines aptitudes intellectuelles (vocabulaire, calcul, représentation spatiale, …)

          • Du niveau d’habileté

          • Des intérêts professionnels

D’un point de vue social c’est lui qui permet d’apprécier les aptitudes du sujet. On se trouve ici au carrefour du psychologique et du social. On a pu observer que souvent, un sujet n’entre dans la délinquance que parce qu’il ignorait son intime vocation.

 

 

LES METHODES DE L’EXAMEN MEDICAL ET PSYCHIATRIQUE :

 

 

Elles sont orientées dans la recherche d’une pathologie.

 

1 – l’examen médical :

 

Il est effectué par un médecin qui doit :

-         apprécier le développement physique du sujet

-         déterminer son état de santé

-         porter un jugement en fonction de ses antécédents héréditaires et personnels

 

Cet examen est susceptible de mettre en évidence :

-         des retards de développement lié à des troubles endocriniens

-         ou des symptômes d’altération nerveuse

 

 

2 – examen psychiatrique :

 

Il se résume essentiellement dans l’examen clinique du sujet dont l’entretien constitue la partie capitale. Mais à côté du caractère subjectif de cet entretien, il doit être réalisé à un examen neurologique. Celui-ci permet l’évaluation de certaines composantes du tempérament et plus particulièrement :

-         du seuil de sensibilité

-         de la régularité du rythme

-         de l’excitabilité générale

-         de la stabilité musculaire

-         de la stabilité émotionnelle

 

 

L’utilisation de ces méthodes forment la base de l’examen médico-psychologique et social ;elles ne s’avère pas toujours suffisantes nécessitant le recours à d’autres méthodes.

 

II – LES AUTRES METHODES :

 

Il faut distinguer ici les méthodes complémentaires à celles précédemment évoquées et celles, nouvelles et autonomes, plus discutables.

 

LES METHODES COMPLEMENTAIRES

 

L’examen médico psychologique et social peut avoir lieu sur un individu libre ont incarcéré. En règle générale il n’est pas nécessaire de garder l’individu en prison pour l’observer, cependant il est des cas où l’examen peut être complété par une observation directe. À cet égard, si l’individu est incarcéré, on peut procéder à une observation directe (EX / Centre d’observation de Fresnes) et à certains examens supplémentaires.

 

1 – L’observation directe :

 

Deux sortes de méthodes ici encore. Celles qui  déterminent l’attitude du sujet à l’égard de son acte et d’autres méthodes qui vont mettre en évidence son comportement social.

 

 

a)      Méthodes qui déterminent l’attitude du sujet :

L’attitude du sujet vis-à-vis de son acte est une question fondamentale parce que le traitement réside dans l’adhésion du sujet à celui-ci. Ainsi tant que le sujet ne sera pas convaincu que son infraction est un mal et qu’il doit pour son bien adopter une attitude différente. Il faut qu’il en soit convaincu car à défaut il ne peut y avoir de transformation. Il faut qu’il y ait un choix de sa part. Ce sont les travailleurs sociaux qui doivent en tant qu’observateurs préparer un plan, une sorte d’aide-mémoire à l’aide duquel ils peuvent diriger la conversation avec le délinquant qu’ils doivent voir tous les jours. Il doit produire ses confidences sans contrainte, dans un climat de confiance. Les travailleurs sociaux doivent savoir écouter. Il y a un principe ici : le détenu doit savoir que dès qu’il a passé la porte de la prison, il ne sera plus question de son passé mais de son avenir.

 

   

b)      Méthodes qui mettent en évidence le comportement social :

Elles supposent la participation de tout le personnel de l’établissement (administration technique et surveillance). Le comportement du sujet doit être noté dans tous ses aspects :

o       Investissement dans le travail

o       Emploi des loisirs (lecture, correspondance)

o       Relations avec la famille, le personnel et les codétenus

Il faut ici que l’attitude positive se reflète dans tous les aspects du comportement et que l’on puisse sentir un effort. Ainsi l’étude du comportement va compléter celle de l’attitude et toutes deux sont indispensables. À ce stade l’observateur ne doit pas interpréter, il doit simplement noter ce qu’il voit ou entend.

 

2 – les examens complémentaires :

 

a)      Les examens biologiques :

On trouve ici des examens :

o       spécifiquement médicaux comme la radiographie des poumons et la cutiréaction (dépistage de la tuberculose)

o       physiologiques comme la capacité cardiaque à l’effort, l’acuité visuelle, auditive

o       endocriniens

o       cytogénétiques qui a pour but de déceler les aberrations chromosomiques

o       neuropsychiatriques notamment l’électroencéphalogramme qui permet de déceler des anomalies cérébrales comme par exemple les tumeurs crâniennes ou  l’épilepsie.

 

b)      Les examens sociologiques :

L’enquête sociale qui est purement descriptive et historique peut avoir besoin d’être complétée par un examen sociologique du cas individuel fait part à un expert particulièrement qualifié. Cet expert procède d’abord à un entretien qui se distingue de celui du psychiatre parce qu’il va approfondir la situation et le contexte social. Il procède ensuite à des techniques scientifiques diverses de la sociologie et de la psychologie sociale qui a pour objet de situer le sujet soit dans un groupe soit dans la collectivité (Exemple : étude sociologique de son quartier pour mieux appréhender la  mentalité du délinquant).

 

 

 

LES METHODES DISCUTABLES

 

 Elles sont discutables parce qu’elles posent le problème de l’effraction de l’intimité du sujet. Les méthodes précédentes ne visent pas à forcer l’armature extérieure du sujet. Bien sûr un test de caractère peut fournir des indications à l’insu du sujet mais ce n’est pas vraiment une effraction de son intimité. En revanche, d’autres méthodes peuvent présenter cet inconvénient même si elles sont employées dans l’intérêt du sujet.

 

1 – les tests projectifs :

 

Ces tests sont utilisés pour révéler des sentiments que le sujet est incapable  ou peu disposé à exprimer. Ainsi avec ces tests, qui peuvent être le dérivé de techniques psychanalytiques ou plus inspirés encore par des conceptions biologiques, l’individu se révèle à son insu.

 

a)      les tests dérivés des techniques psychanalytiques :

 

On distingue deux sortes de tests :

 

Le test de Rorschach :

 

qui est le plus répandu des tests projectifs. Il est susceptible de mettre en évidence certaines maladies mentales. Il consiste à demander au sujet de  regarder dans une série de dix tâches d’encre  et de dire tout ce qu’il voit en elles. D’un point de vue criminologique, ce test a démontré que les délinquants se caractérisent par des réponses traduisant :

o       une tendance à l’opposition agressive

o       une absence de contact affectif

o       un freinage de la maîtrise de soi

   

    Le T.A.T :

    qui est utile pour découvrir la nature des rapports familiaux et des rapports inter-personnels. On soumet au sujet une série de photos et on lui demande de concevoir une histoire pour chacune d’elle. Ce test a permis de constater que le non délinquant manifeste un désir de préserver un mode d’être, d’existence, basé sur la valorisation d’autrui tandis que le délinquant manifeste une vive sensibilité au détail qui laisse supposer un conflit ou une dévalorisation d’autrui.

 

b)      Les tests inspirés par des conceptions biologiques  :

 

2 catégories ici aussi :

   

 

1°) Le Zondi :

    qui est un test destiné à mettre en lumière les besoins instinctifs. On soumet au sujet une série de photos représentant des malades placés dans une situation révélatrice et on lui demande de choisir les deux types les plus antipathiques d’une part et les plus sympathiques d’autre part. Son représentés dans ces images  un sadique, un hystérique, un épileptique, un schizophrène, un paranoïaque, …) le choix désigne :

 

o       les besoins instinctifs satisfaits ou insatisfaits

o       les réactions en face de tendances non satisfaites

    

2°) Le mira : (pas employé en France, plutôt aux USA) qui est un test avec un crayon et un papier où ont fait exécuter au sujet une série de mouvements linéaires afin de mesurer les déviations motrices involontaires commises par le sujet lorsque le contrôle de sa vue est supprimé. Ce test  permet une approche de l’agressivité latente du sujet. On part ici du principe que chaque attitude mentale détermine une modification de l’équilibre du tonus musculaire. Ainsi les déviations et oscilliations effectuées sur le plan horizontal sont en rapport avec l’agressivité.

 

Ces tests  n’aboutissent pas à des résultats précis. En outre leur application n’est pas sans danger par ce qu’ils peuvent provoquer des troubles graves chez le sujet. Certains vont aller encore plus loin dans l’effraction de l’intimité.

 

 

2 – les tests de sincérité :

 

Ils sont employés pour cerner le niveau moral du sujet. Ils sont effectués à l’aide d’un instrument dit le polygraphe qui est un instrument très sensible destiné à enregistrer les modifications :

 

-         cardiaques et respiratoires

-         ainsi que de la résistance cutanée du sujet interrogé.

 

Au début, le sujet va devoir répondre par oui ou par non puis on a recours à la provocation consistant à créer des situations auxquelles on soumet le sujet pour étudier ses réactions.

Cette méthode n’est pas utilisée en France mais au Japon et aux U.S.A. Cette méthode est très controversée et jugée peut pertinente.

 

 

3 – le narco-diagnostic :

 

Il consiste, à l’aide d’un composé médicamenteux barbiturique sodique, mis à la disposition des anesthésistes, a provoqué un état de relâchement de la conscience qui est  intermédiaire entre la veille et le sommeil, aussi léger et aussi court que possible. On utilise la phase de réveil pour procéder à l’examen qui est facilité par des modifications neurologiques et psychologiques provoquées par la narcose. On arrive ici à des techniques mettant en danger les droits de la personne humaine et dont la mise en œuvre se révèle extrêmement critiquable. On voit le risque d’abus qui apparaît derrière la démarche visant à déterminer la personnalité du délinquant afin d’évaluer son état dangereux.

 

 

 

L’EVALUATION DE L’ETAT DANGEREUX :

 

Il s’agit ici de porter une appréciation sur l’état dangereux actuel du sujet et sur son état dangereux futur.

 

I – L’ETAT DANGEREUX ACTUEL :

 

Le diagnostic criminologique a pour but d’évaluer l’état dangereux du sujet c'est-à-dire  sa capacité criminelle et son adaptation sociale. La synthèse de ces deux évaluations va permettre un diagnostic de l’état dangereux.

 

A – L’EVALUATION DES ELEMENTS DE L’ETAT DANGEREUX :

 

Elle consiste dans l’étude de la capacité criminelle et de l’inadaptation sociale.

 

1 – la capacité criminelle :

 

Etablir un diagnostic de capacité criminelle c’est d’abord en rechercher les  éléments chez le sujet.

 

a)      Les éléments de la capacité criminelle :

 

Ce sont ceux  qui déterminent le seuil délinquantiel, c'est-à-dire la plus ou moins grande facilité de passage à l’acte chez le sujet. Il faut donc ici reprendre les différentes phases du passage à l’acte décrites par Etienne De Greff.

-         l’acquiescement inefficace, qui se termine au moment de l’acquiescement formulé. Or ce passage s’effectue au moment où le criminel n’est plus retenu par l’opprobre social qui s’attache à l’étiquette du délinquant et où il y a un processus d’auto légitimation de son acte. Le délinquant a en effet tendance à rendre son acte légitime en dévalorisant les lois et en disant que l’hypocrisie est universelle et qu’il est plus honnête que ceux qui vont le juger. À la base de ce processus, il y a l’égocentrisme qui est une tendance à tout rapporter à soi et qui rend incapable de juger un problème moral à un point de vue autre que le sien. C’est l’égocentrisme qui est révélé ici.

-         L’acquiescement formulé, phase où l’action criminelle est acceptée. C’est alors que va surgir chez le sujet l’idée de la sanction encourue, l‘idée du châtiment. Elle se termine lorsque le criminel ne sera plus retenu par cette idée. Pour expliquer que cette idée ne suffit plus à le retenir, on parle de labilité émotionnelle. (imprévoyance)

-         La crise précédant l’acte criminel : En raison de son dynamisme agressif, le délinquant triomphera ici de tous les obstacles qui se présenteront à lui. L’agressivité se présente alors comme un mécanisme psychologique qui va permettre au délinquant d’aboutir.

-         Le passage à l’acte et ici le défaut d’inhibition s’explique par l’indifférence affective du délinquant vis-à-vis de l’autre, sa victime. Cette inexistence est susceptible de tous les degrés et de toutes les modalités.

L’égocentrisme, la labilité, l’agressivité et l’indifférence affective constitue ce que l’on appelle (Pinatel) le noyau central de la personnalité criminelle. Il convient toutefois de préciser que ces traits existent chez tous les individus mais il semble qu’ils soient plus accentués chez le sujet délinquant ; chacun de ces traits psychologiques peuvent être accusés, moyens ou faibles et définir ainsi la formule individuelle de capacité criminelle.

 

b)      La formule individuelle de la capacité criminelle :

 

Cette capacité peut être forte, moyenne ou faible. Un sujet qui présente des traits très importants d’égocentrisme, de labilité, d’indifférence affective et d’agressivité peut être considéré comme ayant un seuil délinquantiel bas c’est-à-dire une capacité criminelle élevée.

A l’inverse, un sujet qui présenterait des traits faibles d’égocentrisme, de labilité, d’indifférence affective et d’agressivité peut être considéré comme ayant un seuil délinquantiel haut c’est-à-dire une capacité criminelle légère. Entre ces deux formules extrêmes, de nombreuses modalités sont bien sûr possibles.

 

2 –  l’inadaptation sociale

 

Pour le diagnostic d’inadaptation sociale, on va employer les mêmes méthodes.

 

a)      les éléments de l’inadaptabilité :

 

Ils sont constitués par des variables de personnalité parmi lesquels on peut ranger :

o       tous les traits qui se rapportent à l’activité (passif ou actif)

o       les aptitudes (physique, intellectuelle, professionnelle)

o       les traits dynamiques relatifs aux besoins instinctifs (nutritifs, sexuels,…)

Ces traits permettent de mettre en relief la direction générale d’une conduite criminelle ou non criminelle.

 

b)      La formule individuelle de l’inadaptation sociale :

 

Chacun des éléments de l’inadaptabilité peuvent être aussi fort moyen ou faible. Mais la formule individuelle de la meilleure adaptabilité est formée lorsque tous les éléments se situent dans la moyenne. À l’inverse, les formules extrêmes (en plus ou en moins) sont l’expression de l’inadaptation sociale.

On comprend par exemple qu’un sujet très actif ayant des aptitudes physiques, intellectuelles et professionnelles très développées et en même temps des besoins instinctifs importants s’adaptera plus difficilement qu’une personnalité moyenne.

A l’inverse, un sujet passif,  qui va avoir de faibles aptitudes physiques, intellectuelles et professionnelles et des besoins instinctifs pauvres se laissera ballotter par les événements et n’aura aucune prise sur eux.

Entre ces formules extrêmes, de multiples formules peuvent exister. Du point de vue de l’inadaptation sociale, c’est parmi elle qu’on rencontre la grande masse des délinquants : sujets très actifs ou passifs ayant des aptitudes faibles et des besoins instinctifs élevés.

 

B – LE DIAGNOSTIC DE L’ETAT DANGEREUX :

 

A partir des formules individuelles de la capacité criminelle et de l’inadaptation sociale, on va pouvoir faire de sorte de diagnostics.

 

1 – le diagnostic clinique

 

La capacité criminelle étant indépendante de l’inadaptabilité, toutes les deux varient séparément et offrent quatre combinaisons possibles différentes :

 

-         la capacité criminelle élevée et l’adaptabilité très forte :

Cette forme réalise la forme la plus grave de l’état dangereux. Ces personnalités criminelles sont celles qui savent exercer une activité criminelle sans se faire prendre tout en paraissant adaptées aux normes sociales. Ce sont les plus sociables mais aussi les plus dénués de moralité. (Exemple : criminalité en col blanc).

 

-         la capacité criminelle très élevée et l’adaptabilité incertaine :

C’est la forme la moins grave de l’état dangereux car l’inadaptation sociale de ces sujets attire forcément l’attention sur eux. Ce sont des criminels professionnels dont la carrière se déroule sous le double signe de l’organisation méthodique et du refus d’exercer une profession socialement définie. Parmi eux ou à côté se trouvent des délinquants marginaux qui ont moins d’aptitudes intellectuelles et qui sont  confinés dans une délinquance épisodique ou subalterne.

 

-         capacité criminelle faible et adaptabilité très faible :

Cette forme est encore moins grave que la précédente. Ce sont ici les sujets qui constituent la clientèle habituelle des prisons. Parmi eux on trouvent des psychopathes, voire des débiles qui sont ballottés par les circonstances et enfermés dans une délinquance d’habitude et de peu d’envergure. Ce sont ceux qui n’ont pas réussi dans leur carrière criminelle et qui sont inadaptées aussi bien au crime qu’à la vie sociale.

 

-         capacité criminelle très faible et adaptabilité très élevée :

C’est la forme la plus légère de l’état dangereux bien que malheureusement sous la pression d’une situation spécifique, elle peut donner naissance à des actes parfois très graves mais qui resteront isolés dans la vie du sujet.

Il s’agit ici de délinquants occasionnels ou de délinquants passionnels.

 

Cette constatation clinique de l’état dangereux doit être complétée.

 

(ICI  FIN DU COURS EN  2005)

 

2 – le diagnostic étiologique :

 

Ce diagnostic décèle les facteurs qui ont le plus d’influence sur le comportement du sujet. Tout comportement humain est d’abord un phénomène psychologique mais sur lequel le psychisme agit ainsi que des facteurs biologiques et sociaux.

Malheureusement il n’existe pas à l’heure actuelle une explication satisfaisante sur le développement des comportements criminels. En effet des statistiques tenant compte de l’influence forte ou légère des facteurs biologiques ou sociaux ont mis en lumière que l’influence prédominante d’un facteur est exceptionnelle.

Dans la pratique, ce diagnostic conduit à envisager diverses combinaisons :

-         une influence biologique forte peut se combiner avec une influence sociale forte. Dans ce cas l’état dangereux est chronique.

-         Une influence biologique forte peut se combiner avec une influence sociale légère ou l’inverse (biologique légère et sociale forte) ; dans ce cas, l’état dangereux est marginal.

-         Une influence biologique légère et une influence sociale légère conduisent à un état dangereux épisodique

Les différentes études ont mis en évidence que le milieu social est plus important dans l’étiologie de l’état dangereux que le facteur génétique. Quoi qu’il en soit, ces différentes combinaisons peuvent relever des différences de gravité de l’état dangereux et laisser plus ou moins bien augurer de l’avenir. Cette évaluation de l’état dangereux actuel va permettre d’envisager le futur c’est-à-dire le pronostic social.

 

II – L’ETAT DANGEREUX FUTUR :

 

Pour permettent ce pronostic social qui est le comportement ultérieur du sujet, diverses méthodes ont été utilisés mais aucune n’est satisfaisante dans la mesure où elles sont essentiellement d’ordre statistique. Deux catégories de méthodes sont utilisées.

 

A – LES SCHEMAS DE PRONOSTIC :

 

C’est l’école allemande qui a mis au point cette technique.

 

1 – la technique

 

On choisi un certain nombre de facteurs comme par exemple les antécédents héréditaires, familiaux ou sociaux et on recherche le nombre de fois où ils ont joué pour le récidivisme d’un groupe de délinquants.

Schématiquement, pour chaque délinquant, on note combien de signes défavorables se rencontrent et on calcule pour 1,2 3 de ces signes combien il y a de pourcentage de récidive.

Pour chaque signe, on donne une valeur statistique spéciale et c’est la somme des mauvais points qui va indiquer la probabilité de récidive. Le traitement sera fonction de ce pronostic.

 

2 – la critique :

 

Le pronostic se fonde évidemment sur le diagnostic qui est établi par comparaison avec d’autres cas similaires déjà connus qui constituent des modèles plus ou moins typiques dont la reconnaissance et l’évaluation sont relativement faciles. Malheureusement, de même qu’il n’y a pas de maladie mais des malades, dans la clinique criminologique, la majorité des cas ne rentrent pas exactement à l’intérieur des modèles. Le diagnostic est en conséquence difficile et le pronostic aléatoire. Si les constellations extrêmes, tels que la délinquance d’habitude ou celle occasionnelle sont faciles à identifier et à prévoir, en revanche dans les zones intermédiaires, les jugements que font les cliniciens sont les mêmes que ce qu’un profane instruit pourrait faire.

 

B – LES TABLES DE PREDICTION :              

 

C’est l’école américaine qui a mis au point cette technique ; la plus connu et celle des époux Gluck. C’est elle que l’on va envisager ici.

 

1 – Le cadre :

 

Les époux Gluck ont poursuivi un but audacieux à l’inverse de leurs prédécesseurs qui se sont contentés de vouloir prédire le récidivisme, ils ont voulu mettre au point un instrument de sélection des délinquants en puissance dès leur entrée à l’école.

Ils ont alors procédé à une étude comparative de deux groupes de 500 jeunes délinquants et de 500  non délinquants. Ces 1000 sujets ont été choisis dans des milieux sociaux sensiblement identiques et ils ont veillé à ce qu’ils aient des niveaux intellectuels similaires.

 

Après une étude différentielle, ils ont constaté :

-         sur le plan social, c’est dans la sphère des relations du groupe familial qu’il faut  rechercher les traits propres au délinquant (discipline de l’enfant, affection et cohésion familiale).

-         Sur le plan psychologique, les facteurs caractériels  ont été déterminés avec les tests Rorschach ; ils ont retenu cinq traits de caractère :

o       Affirmation sociale

o       Mépris

o       Soupçon

o       Penchant à détruire

o       Impulsivité

Ces traits de caractère sont regroupés sur le plan psychiatrique par la méthode de l’entretien du sujet pour dégager si celui-ci est aventureux, dans l’action, suggestible, obstiné, instable affectivement.

C’est à partir de ces instruments ils ont construit des tableaux statistiques permettant de déterminer par un simple regard sur une table les risques de délinquance ou de non délinquance d’un enfant.

 

2 – la valeur :

 

Elle est très discutable car les résultats obtenus dans les trois séries de table ne coïncident pas et le taux d’erreur peut atteindre 67 %. En outre, ces tables ont été attaquées sur le plan éthique ; on a parlé de médecine vétérinaire et non de travail sur l’homme.

Sur le plan méthodologique, on a parlé de faux aspect scientifique. Les époux Glueck ont eux-mêmes ont reconnu que la prédiction est limitée par trois éléments :

-         l’incapacité du psychologue à prévoir certains éléments particuliers

-         la vitesse de transmission inférieure à celle des événements

-         une indétermination inhérente à des processus psychologiques que la finesse des observations ne peut pas révéler.

Il apparaît que la valeur de ces tables est trop faible pour être utilisées et qu’on ne peut pas prévoir la dangerosité future du sujet sur ces bases.

 

 

SECTION III – LE TRAITEMENT DE L’ETAT DANGEREUX :

 

La criminologie clinique est construite dans la perspective du traitement de l’état dangereux afin de rendre le sujet apte à la vie en société. Il n’existe pas en criminologie de thérapeutique standardisée comme c’est le cas en clinique médicale. À partir d’un certain nombre de méthodes de traitement, on va élaborer pour chaque délinquant à un programme particulier pouvant lu être appliqué.

 

I – LES DIFFERENTES METHODES DE TRAITEMENT :

 

Il s’agit ici d’agir sur les facteurs de l’état dangereux.

 

A – LES METHODES ABANDONNEES :

 

Certains traitements médicaux ou chirurgicaux avaient autrefois été mis en œuvre en France ce qui soulève des problèmes graves d’ordre philosophique ou religieux, d’autant plus que l’efficacité de ces méthodes est très réduite.

 

1 – Les électrochocs :

 

En dehors de maladies mentales déterminées, on sait que les électrochocs ne sont pas une méthode de traitement. Pourtant Di Tullio et Laggini ont soutenu qu’il fallait multiplier les électrochocs sur les délinquants de façon à créer un véritable état d’amnésie et d’obnubilation créant dans la vie psychique du délinquant une véritable annulation transitoire de sa personnalité. Cette thèse a évidemment soulevé beaucoup de critiques et n’est pas employé en France (contrairement aux Etats-Unis et au Canada où elle est utilisée).

 

2 – le traitement chirurgical :

 

Il est de deux sortes :

ü      la castration ou la stérilisation qui constitue une importante modification de la morphologie du caractère.

Morphologiquement, on constate une diminution de la force musculaire et du système pileux. Psychologiquement, des tendances impulsives et violentes de nature sexuelle sont supprimées. Dans certains cas l’opération conduit à un état d’abattement qui normalement disparaît au bout de deux ans et l’activité intellectuelle est améliorée par la disparition de l’inquiétude sexuelle. Cette méthode mise en place sous l’Allemagne nazie n’est plus appliquée en France parce qu’on a considéré qu’elle se heurte au respect le plus élémentaire de la dignité humaine. Elle est encore appliquée aux Etats-Unis et dans certains pays scandinaves.

ü      La lobotomie ou thalamotomie : qui a été pratiquée en France à la seule initiative du docteur Brousseau dans les années 1950 sur des sujets qui avaient été confiés au service des aliénés criminels de Villejuif.

Quinze récidivistes ont bien voulu se prêter à une lobotomie et onze d’entre eux ont été par la suite remis en liberté cinq seulement ont pu demeurer en liberté et mener une vie familiale et professionnelle normale. Cette méthode qui consiste à sectionner certaines fibres nerveuses du cerveau n’a pas eu le succès espéré. Elle a été progressivement abandonné en France où l’on s’est tournée principalement vers des méthodes psychologiques. La lobotomie est encore utilisée en Allemagne.

 

B – LES METHODES POSSIBLES :

 

Il en existe de nombreuses, psychologiques de traitement, qui permettent de renouveler les motivations et de modifier les attitudes. On peut en distinguer deux principales :

 

1 – les psychothérapies :

 

a)      individuelles :

 

La psychothérapie de soutien, d’abord, repose sur une relation personnelle entre le psychothérapeute et le sujet. Le psychothérapeute peut dans certains cas utiliser :

o       la persuasion

o       la suggestion

Il s’agit ici d’amener le sujet au contrôle de soi-même. On s’efforce d’agir par l’intermédiaire de raisonnements sur les mécanismes psychologiques du sujet. La psychanalyse qui comme la précédente est basée sur la relation personnelle entre le médecin et son patient à un but néanmoins différent en ce sens que la psychanalyse tend à mettre en lumière des conflits inconscients. La psychanalyse basée sur la relation de transfert et de procédés d’associations libres est une psychothérapie longue et difficile. Il est assez difficile voire quasiment impossible d’entreprendre une psychanalyse à l’égard des délinquants en raison de leur personnalité et plus particulièrement de leurs difficultés à la verbalisation. En outre, l’incarcération rend pratiquement impossible ce traitement à cause de l’ambiance régnant dans la prison. Il y a en permanence des menaces de sanctions.

 

b)      de groupe :

 

L’objet de la psychothérapie de groupe et de tracer et d’analyser l’histoire des origines.

Ces problèmes sont discutés dans des réunions dont l’objectif est la discussion qui va permettre d’ouvrir des possibilités thérapeutiques. Ainsi l’action de la parole permet de libérer le sujet de ses tensions agressives et la liquidation du conflit est favorisée par les explications collectives qui montre au sujet qu’il n’est pas le seul dans ce cas.

La thérapie de groupe est une des premières expériences réalisée aux Etats-Unis après la guerre à des détenus incarcérés. Malheureusement on a assisté à une dénaturation de la méthode qui a été utilisée pour désigner des procédés éducatifs tels que les activités de clubs de loisirs ou de centre d’études. Cette méthode qualifiée, de groupe cancelling,  par les Américains ne peut être efficace que si la personnalité du sujet n’est pas trop endommagée.

Le psychodrame est aussi une thérapie de groupe mais ici à la différence de la précédente le groupe est utilisé dans la thérapie. Il réalise le traitement des troubles de l’adaptation par le jeu dramatique, le sujet jouant son histoire avec spontanéité. Ce sujet est entouré d’un nombre important d’aides qui vont tenir le rôle du père, de la mère du conjoint et joué selon les directives du sujet ; puis ces aides vont intervenir de façon plus active en se créant des rôles où le sujet doit s’adapter. On passe alors du psychodrame au sociodrame et on connaît ainsi les sentiments d’attirance, de répulsion ou d’indifférence éprouvés à l’égard des autres membres du groupe par le sujet.

 

2 – les thérapies comportementales :

 

Ces thérapies dites béhavoriales sont fondées sur les principes de l’apprentissage        . Elles sont pratiquées sur une base individuelle et centrées sur un problème particulier. Elles sont basées sur le conditionnement de l’individu. Il en existe deux sortes :

 

a)      le conditionnement classique :

Il a pour objet d’engendrer sur le sujet de l’aversion face à certains stimuli. Exemple : les délinquants sexuels vont être soumis à des chocs électriques pour des réponses à des stimuli sexuels. En France cette méthode est utilisée pour le traitement des alcooliques dangereux pour autrui et on a utilisé un produit : l’Antabuse comme thérapie aversive qui consiste à provoquer une répulsion vis-à-vis de l’alcool.

 

b)      le conditionnement opérant :

Il est fondé sur un système de jetons pour modifier certaines conduites à la maison, à l’école, au travail mais aussi en milieu institutionnel. Développée en Amérique du Nord, cette méthode tend à favoriser l’émulation et la compétition par un système reposant sur des jetons distribués à titre de récompense. Dans ce type de thérapie (comportementale) on se trouve dans un domaine où l’autonomie de l’individu peut être mise en péril et où la thérapie constitue une manipulation purement psychologique qui peut se révéler dangereuse pour les libertés individuelles.